Merci de ne PAS poster de messages concernant la vente d'un organe et comportant des coordonnées téléphoniques, e-mail, etc. La loi française interdit la vente d'organes.

Le Parlement égyptien vote une loi criminalisant la vente d’organes

"Ces dernières années, le commerce d’organes s’est développé en Égypte, où le prélèvement d’organes sur les personnes décédées était jusque-là interdit. Une loi votée dimanche 7 mars veut mettre un terme au trafic et encadrer les greffes.

Safia et Youssef habitent un quartier pauvre du Caire. Ils ont quatre enfants. Dans leur appartement, il n’y a presque aucun meuble, les murs sont nus. 'Ma mère et ma sœur avaient des dettes', explique Youssef. 'Les enfants n’avaient rien à manger', ajoute sa femme, Safia. Il y a deux ans, ils ont chacun vendu un rein, pour 11 000 livres égyptiennes (1 470 EUR).

Le couple, interrogé par Coalition for Organ Failure Solution (Cofs), une ONG internationale qui a réalisé un documentaire sur le sujet, est encore aujourd’hui dans une situation financière délicate. 'Bien sûr je regrette ce que j’ai fait. Avec ma santé, tout aurait été possible', déplore Youssef, qui ne s’est jamais complètement remis de l’opération.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Égypte est, avec l’Inde, la Chine et les Philippines, l’un des pays du monde les plus touchés par le trafic d’organes. Entre 500 et 1 000 greffes de rein y sont effectuées chaque année, et d’après le Cofs, 90 pour cent des organes sont achetés à des donneurs vivants.

Entre 2 200 et 2 600 EUR

Payé en général entre 2 200 et 2 600 EUR au donneur (une somme, alors que 40 pour cent de la population égyptienne vit avec moins de deux euros par jour), le rein est revendu jusqu’à 12 000 EUR au malade, Égyptien fortuné ou ressortissant des pays de la péninsule arabique. Entre les deux, plusieurs intermédiaires profitent de ce commerce, du rabatteur qui parcourt les quartiers déshérités pour trouver des donneurs, aux médecins et infirmiers qui procèdent aux opérations.

Jusqu’ici, l’Égypte offrait en effet un terrain propice au trafic : avant le vote de la nouvelle loi, le prélèvement d’organes sur les cadavres y était interdit, ne laissant aux malades pas d’autres recours que les donneurs vivants. Aucune sanction pénale n’était prévue pour punir l’achat d’organes, tandis que les donneurs potentiels, des Égyptiens pauvres et peu conscients des risques, sont nombreux. Il n’est ainsi pas rare de trouver un rein ou un lobe de foie à vendre dans les petites annonces des journaux. 'Le phénomène a rapidement pris de l’ampleur ces dernières années', affirme Marwa Ali Sabah, directrice pour le Moyen-Orient et l’Asie de Cofs.

Malgré l’urgence, les députés égyptiens se sont enlisés dans un débat éthique et religieux sur le sujet, et l’élaboration de la loi a pris plus de dix ans. La question de la définition de la mort a suscité un inextricable débat. Alors que les médecins décrivent la mort clinique comme le résultat de l’arrêt du cerveau, certains députés maintenaient que l’arrêt du cœur devait être retenu comme le seul critère ... Autant dire que la loi votée dimanche il y a une semaine a été accueillie avec soulagement par les militants associatifs. 'C’est un bon texte', assure Alaa Ghanam, responsable des questions de santé à l’Initiative égyptienne pour les droits de la personne (EIPR).

Pour les Égyptiens le corps du défunt reste sacré

Pour mettre fin au trafic, le nouveau texte criminalise le commerce d’organes et autorise le prélèvement sur les morts. 'Un comité de trois médecins a été formé pour s’accorder sur une définition scientifique de la mort', précise Alaa Ghanam. Une équipe d’experts, chargée de déterminer si le donneur est bien mort, devrait ensuite être mise en place dans chaque hôpital accrédité par le ministère de la santé pour effectuer des greffes.

'Il va falloir établir une liste d’attente nationale des malades, s’assurer que les patients démunis bénéficient aussi des greffes, et que les organes prélevés ne font pas l’objet d’un nouveau trafic', prévient Marwa Ali Sabah.

Au-delà des problèmes d’organisation du nouveau système, le plus dur sera peut-être de convaincre les Égyptiens du bien-fondé du don d’organes. 'Si les gens pensent qu’il existe toujours un trafic, ils refuseront de signer l’autorisation de prélèvement après leur mort', souligne Alaa Ghanam. D’autre part, alors que 18 pays musulmans, dont l’Arabie saoudite, ont autorisé le prélèvement d’organes sur les morts, cette idée a beaucoup de mal à passer en Égypte, pour des raisons culturelles plus que religieuses. Pour les Égyptiens, coptes comme musulmans, le corps du défunt reste sacré, une conception qui remonte à l’époque des Pharaons."

http://www.la-croix.com
Article de Nina HUBINET, au CAIRE

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