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Canada : la transplantation de sang de cordon

Très émouvant ! A lire absolument !
Martin Champagne, Hémato-oncologue et directeur du programme de thérapie cellulaire au CHU Sainte-Justine, Montréal, Québec
"Au moment où je tourne la page sur 15 ans de pratique en cancérologie chez l'enfant, j'aimerais témoigner de l'expérience du CHU Sainte-Justine en transplantation de sang de cordon."

"L'enfant qui se voit offrir une greffe de moelle osseuse est confronté à une maladie autrement mortelle, pour laquelle il n'existe pas de solution thérapeutique. Certains d'entre eux luttent déjà depuis quelque temps, d'autres sont de nouveaux 'arrivants' dans le système de santé. Le programme de transplantation hématopoïétique a été créé à l'hôpital Sainte-Justine en 1994 à partir du besoin d'assurer en milieu pédiatrique cette activité. [...]

Malgré les avancées importantes en cancérologie pédiatrique (près de 85 pour cent des enfants atteints de leucémie lymphoblastique, la forme la plus commune, sont maintenant guéris grâce aux chimiothérapies de première ligne), la greffe offre les meilleures chances, parfois même la seule chance, de guérison à environ une soixantaine d'enfants du Québec chaque année.

La probabilité pour deux enfants, nés des mêmes parents, d'être compatibles pour les besoins de la greffe sont de une sur quatre. Compte tenu de la taille réduite des familles d'aujourd'hui, seulement 30 pour cent des enfants nécessitant une telle greffe ont un donneur familial. Pour ceux qui n'ont pas un tel donneur, il faut se tourner vers les registres de donneurs volontaires de moelle osseuse.

La probabilité, pour deux caucasiens (de race blanche) qui ne sont pas apparentés, d'être compatibles varie de une sur 10 000 à moins de une sur un million. Pour certains groupes ethniques, les chances de trouver un donneur sont encore plus limitées. Malgré le fait qu'ils soient maintenant constitués de millions de donneurs volontaires et que l'on constate dans les dernières années une nette amélioration de la performance des registres (70 pour cent des gens ayant besoin d'une transplantation auront un donneur), en 1996 nous n'étions en mesure d'offrir la greffe (en raison de la non-disponibilité des donneurs) qu'à 50 pour cent des enfants nécessitant une transplantation : pour dix enfants donnés, la maladie progressait chez deux, alors que chez trois autres aucun donneur compatible n'était trouvé.

Le sang de cordon semblait dès cette époque offrir des possibilités intéressantes. En effet, alors qu'une compatibilité parfaite est requise lorsqu'on utilise la moelle osseuse pour effectuer une transplantation, une compatibilité partielle semblait possible en utilisant le sang de cordon. La possibilité de 'gagner le gros lot' avec une combinaison à quatre chiffres est infiniment plus grande que lorsqu'une combinaison à six chiffres est requise. Cette 'flexibilité immunologique' accrue rend le choix plus rapide.

Une première greffe, en collaboration avec le Dr Gilles Roy, la Croix-Rouge de Montréal et l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, fut effectuée alors qu'une mère accouchait d'un nourrisson compatible avec un enfant nécessitant une greffe.

75 pour cent de l'expérience canadienne


Peu de temps après, un enfant nécessitant une transplantation urgente et chez qui aucun donneur de moelle n'était trouvé fut l'objet d'une transplantation de sang de cordon non apparentée. D'innovatrice, l'application a grandi : nous avons maintenant réalisé plus de 130 greffes de sang de cordon, soit plus de 75 pour cent de l'expérience canadienne.

Notre groupe a fait la démonstration que, en comparaison avec la moelle osseuse provenant d'un donneur non apparenté, la transplantation du sang de cordon peut être réalisée beaucoup plus rapidement et que les résultats étaient tout à fait comparables en matière de chance de guérison à ceux obtenus avec la greffe de moelle osseuse. La publication de ces travaux a contribué à faire reconnaître la transplantation de sang de cordon comme solution de rechange, chez l'enfant nécessitant une greffe non apparentée, à la moelle osseuse. La résultante est que nous sommes désormais en mesure d'offrir l'option de la transplantation à plus d'enfants : le sang de cordon, en raison de sa latitude immunologique (critères moins restrictifs de compatibilité), permet en effet de trouver un donneur pour 99 pour cent des enfants en attente d'une greffe.

Héma-Québec a su seconder ces efforts et a participé activement à la mise sur pied de la banque de sang de cordon du Québec. Le déchet biomédical est recueilli sans risque pour la mère ou le nouveau-né chez les femmes qui y consentent dans les centres participants (dans la région de Montréal : Sainte-Justine, St. Mary, Royal-Victoria, LaSalle, Cité de la santé, et bientôt les Centre mère enfant du CHUQ et Saint-François d'Assise, à Québec).

Des efforts sont déployés notamment pour recruter auprès des communautés démographiques, insuffisamment représentées dans les registres de donneurs volontaires de moelle : la démographie québécoise est en mutation, et il est de notre responsabilité sociale d'offrir dès aujourd'hui aux enfants du Québec de tous les horizons les meilleures chances de guérison. Près de 1.000 échantillons sont maintenant disponibles pour donner la chance de sauver une vie grâce à la générosité des femmes du Québec.

Le parcours de la greffe n'est pas un long fleuve tranquille. La mort vient trop souvent cogner à la porte. Alors que notre société occidentale investit en recherche dite fondamentale, il reste encore beaucoup à faire afin de soutenir les activités cliniques et trouver des traitements plus efficaces, moins toxiques. Également, si la transplantation de sang de cordon est d'application fréquente chez l'enfant, plusieurs obstacles, dont certains tiennent à la dose limitée de cellules contenues dans un greffon, existent encore pour une plus grande utilisation chez les adultes : les défis à relever, dans les prochaines années, demeurent nombreux.

Ce témoignage se veut d'abord et avant tout une reconnaissance du courage et de la détermination de dizaines d'enfants qui luttent contre une maladie qui ne leur fait pas de quartier. Certaines d'entre elles sont bien connues du grand public : cancer, leucémie sont des noms qui font réagir. D'autres, beaucoup plus rares, sont méconnues: syndrome de Krabbe, adrénoleucodystrophie, déficits immunitaires. Toutes sont mortelles et demandent, pour l'enfant qui en est atteint, ainsi que sa famille, d'aller puiser au plus profond de soi.

Ce combat ne serait pas possible sans le soutien des familles, qui doivent continuer, malgré tout, à répondre à leurs obligations scolaires, financières, tout en menant cette lutte.

Je tiens également à rendre hommage aux dizaines de professionnels, infirmières, pharmaciennes, technologistes, plusieurs oeuvrant dans l'ombre d'un programme de transplantation, mais qui en assurent le succès au quotidien et qui permettent à ces enfants de lutter pour leur survie. À l'échelle nord-américaine, les docteurs Donna Wall, John Wagner, Pablo Rubinstein et Joan Kurtzberg, notamment, nous ont toujours témoigné leur appui.

À tous ceux, donc, qui ont su inspirer par leur courage l'équipe de transplantation hématopoïétique, ou qui ont contribué par leur dévouement à son succès, je présente mes salutations : vous habiterez désormais dans mes souvenirs."

Source :
http://www.ledevoir.com

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